Décembre 2010
Chers
amis,
Voici venu le temps des brumes, des pluies et des
vents de glace, des nuits étirées et des matins enneigés. Voici venu le temps
des fêtes et des mille feux, des étoiles dans nos yeux et des souvenirs de
notre enfance. Voici venu le temps de vous écrire une nouvelle tranche de vie
passée, avec mes rêves vécus, seul ou en famille, avec les amis et aussi avec
mes coups de cœur et mes coups de gueule. Ainsi passe le temps, au fil des ans,
on prend de l’âge, on mûrit et toujours on apprend. On est encore là pour le
dire. En courant, l’homme moderne qui n’a jamais le temps et qui regarde sa
montre toutes les cinq minutes, tente d’esquiver la légion de fantômes à ses
trousses et de zombis qu’il s’est créés lui-même. Où cours-tu au milieu du
stress et du brouhaha de notre civilisation ? De l’ordinateur au portable,
d’arnaques en déceptions, de conflits en catastrophe, d’agressions en
pollutions. Slogans, images, rythmes, bruits, appels au secours, nous fouettent
en avant comme le cerceau de notre jeunesse et derrière nous grandissent les
montagnes de déchets et d’immondices que nous produisons sans répit. Je vous
entends me taxer de pessi, à tort, je constate
seulement. La cible de notre « ordre social et industriel » dopé par
les banques et la mondialisation, ne vise rien d’autre que sa destruction et
l’avalanche de gadgets et de machines infernales, que nous inventons, y
contribue. Quel gâchis. Sardou, qui marie si bien la magie du texte à celle de
la musique, l’a chanté, il y a plus de 20 ans déjà : « Lénine,
réveille-toi, ils sont devenus fous… ». Loin de ce monde virtuel, en
danger permanent, dans mon jardin de la Kirschlerie,
ou hors des sentiers battus, j’ai la chance inouïe de trouver la sérénité et
reste l’opti que je suis. Il existe un espace que
rien ne menace et qui n’encourt aucun risque de destruction, qu’il faut
préserver à tout prix en nous-mêmes, c’est l’amour. Ne voir et n’entendre que
le souffle du vent pour s’aérer le corps et l’esprit. C’est la musique du
silence. C’est un vaste bonheur qui donne un goût d’infini. Marcher au rythme
de la fleur qui s’ouvre, faire attention au temps, aux heures de l’univers et
non à celle des trains, mais à celle de notre horloge interne. A propos du
temps, toujours le temps, celui que nous ne maitrisons pas et qui est pourtant
le même pour nous tous, voilà comme promis l’année dernière, l’histoire des
cailloux, que vous ne connaissez pas, puisque personne n’y a fait
allusion : Lors d’un stage de formation dans une vie antérieure, le
professeur prend un bocal et y met trois gros cailloux. Le bocal est rempli. On
ne peut plus en rajouter. Tous sont d’accord. Pourtant il en rajoute encore
trois autres, plus petits et encore trois et ainsi de suite, toujours plus
petits, qui se glissent dans les espaces vides. Finalement le bocal est archi
plein et pourtant. Ne pouvant plus ajouter de cailloux ni de gravillons il y
fait glisser du sable fin qui s’écoule lentement au fond et le bocal est enfin
rempli à ras bord. On est tous d’accord qu’on ne pouvait plus rien y ajouter,
qu’il y a des limites. Mais non, il restait encore assez de place pour une
bonne quantité d’eau qui remplit doucement l’espace restant. Vous avez compris, il reste toujours une demi-heure ou
une demi-journée même si nous croyons être occupés à plein temps. Ne dites plus
« kenn Zitt » ou
« pas le temps ». Il y a encore de la place pour beaucoup de choses. Ne
serait-ce que pour l’amour ou la prière, la poésie ou la gastronomie, pourquoi
pas la rêverie ou les projets ? La fin de l’année est propice pour ce
genre d’exercice. Dehors le soleil se lève tard et se couche tôt, embrasant
l’horizon de ses couleurs impossibles à reproduire. Dans les chaumières on
allume le feu de cheminée, c’est l’heure du thé fumant et des livres ouverts
sur des pages d’aventure, assis dans le fauteuil, accompagné d’un Armagnac hors
d’âge, long en bouche. Demain on fera les « Spritzgebackene »,
les « Schnecke » et la confiture de Noël.
La semaine prochaine on fera macérer le foie gras et on choisira Nous
n’avons pas été découvrir des pays lointains et n’avons pas pris l’avion.
Est-ce un signe ? Par contre, ma sœur Cécile, cette veuve joyeuse et
pèlerine enchantée est sortie de ses gonds et croque sa liberté par les deux
bouts. P.E. Victor a dit : « La seule chose promise d’avance à
l’échec, c’est celle que l’on ne tente pas. » Elle a osé. Elle est partie
en Scooter, via la Charente jusqu’à Santiago Di Compostella
où elle s’est fait voler son deux-roues. Elle rentre en avion à Toulouse puis
en train au pays, mission accomplie et complètement happy. Elle repart quelques
semaines en Tunisie et actuellement elle fait une croisière à travers
l’Atlantique aux Caraïbes. Mon frère Robert avec Nady, ont passé l’été en
Nouvelle Calédonie, puis une semaine au Sénégal. Robert a navigué jusqu’aux
Baléares avec un copain sur Dagy (voir les archives
2010 sur ce site).
Le grand frère, avec sa petite Josy sont partis fin
janvier, avec le Club Vosgien à l’Alpe d’Huez, dans la neige et en altitude
pour se faire des globules rouges. Josy n’a pas bien
supporté et a fait un œdème. Repos forcé les derniers jours des vacances. En
février nous sommes à Leyrieu. En mars le printemps
s’installe à la Kirschlerie dans toute sa divine
splendeur. En avril je me sens pousser des ailes et avant les travaux de
jardinage, je pars avec Bertrand en Poméranie (Ost Vor Pommern)
en Baltique où nous habitons à bord de Jopaluka, à Lassan, sur les rives de Je ne vous ai pas parlé des enfants qui vont tous bien
et qu’on aime beaucoup. Ils seront nommés en 2011, qui sera l’année du
changement. Quant à nos petits-enfants, ils poursuivent leur chemin et leurs
études normalement. Ils grandissent et nous dépassent d’une tête au propre
comme au figuré. Qui aurait pu supposer qu’en moins de 50 ans nous en saurions tellement plus et nous comprendrions tellement moins ?
|
Les chiffons font le papier,
le papier fait la
monnaie,
la monnaie fait les banques, les banques font les emprunts,
les emprunts font les
mendiants,
les mendiants font les
chiffons,
les chiffons font le
papier.
|
Compo, mise en page, photogravure Romain – Impression Marie-Paule |